Une nouvelle façon d’aborder l’apprentissage des langues qui s’intègre particulièrement bien dans l’approche actionnelle dont nous parlions plus haut nous est présentée par Pierre Morel, Chef du projet « Langue française, francophonie, diversité linguistique » à l’Agence universitaire de la Francophonie à Montréal :
La compréhension multilingue est une approche pédagogique qui vise à développer la compréhension de la langue de l’autre / des autres tout en conservant pour chacun la possibilité d’utiliser sa propre langue (chacun parle dans sa langue et tout le monde comprend tout le monde). Elle implique donc la réciprocité.
Les travaux dans le domaine (approfondissements théoriques et expérimentations) ont connu un essor important depuis que l’Union européenne a apporté son soutien à plusieurs projets : voir à ce propos le site RECOMU - REseau COmpréhension MUltilingue en Europe – réalisé par le Centre de Recherche en Ingénierie Multilingue de l’INALCO (CRIM) à l’adresse http://crim.inalco.fr/recomu/index.phtml?lang=fr. C’est dans ce cadre que s’est en particulier développé le programme Eurom, coordonné par Claire Blanche-Benveniste (voir le numéro spécial du « Français dans le monde » « L’intercompréhension : le cas des langues romanes » paru en janvier 97).
La compréhension multilingue a l’avantage de s’appuyer sur une vision de la langue en contexte, qui fait leur place à toutes les formes d’expression et d’apprentissage non-conventionnelles, et d’être réaliste en prenant en compte les contraintes qui empêchent, par manque de temps en particulier, de travailler sur les quatre compétences (compréhension orale, compréhension écrite, expression orale, expression écrite) Elle n’est évidemment pas exclusive des formes d’enseignement plus traditionnelles.
Certes, elle va à l’encontre du préjugé habituel qui voudrait qu’un échange entre deux ou plusieurs interlocuteurs se déroule dans la même langue, malgré les déséquilibres et l’inconfort, voire les tensions, à l’oral surtout, que cela crée lorsque les interlocuteurs sont de langue d’usage différente.
Elle nécessite donc de dépasser un certain tabou psychologique et social, mais elle a l’avantage d’être moins coûteuse, en particulier en temps d’apprentissage, et donc de pouvoir répondre aux besoins d’apprenants motivés mais peu disponibles.
Paru dans la revue mensuelle de la Panhellenic Federation of Language School Owners (PALSO) en mai 2001.