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Concevoir son propre matériel didactique : la démarche à suivre

Les étapes de la confection du matériel didactique, concrétisées chacune par un exemple.

1 INTRODUCTION

Selon Tocatlidou (2003 : 252), « le matériel didactique ou d’apprentissage est le champ de confirmation et de matérialisation de toutes les hypothèses théoriques concernant aussi bien la langue elle-même et la communication, que l’enseignement/ apprentissage des langues ».
En effet, les apports du progrès de la technologie, ainsi que ceux des courants pédagogiques modernes dans le domaine de la didactique des langues étrangères (désormais LE), ne nous permettent plus d’envisager l’enseignant d’une LE comme un simple applicateur d’un manuel, mais plutôt, comme nous allons le voir dans les sections qui suivent, comme une sorte d’architecte. D’ailleurs, la fixation stricte de l’enseignant sur le manuel et la considération de ce dernier comme l’« Evangile » du cours engendrent l’ennui, créent des conditions d’apprentissage peu fécondes et paraissent constituer une utopie.

Au fil de cet article, nous allons présenter toutes les étapes de la confection du matériel didactique, concrétisées chacune par un exemple. Notre présentation va déboucher sur une exploitation pédagogique réalisée par l’assemblage de tous les exemples cités auparavant.

2 LES ÉTAPES DE L’ÉLABORATION

Nombreuses sont les raisons qui pourraient inciter un enseignant de FLE à s’atteler à la confection de son propre matériel didactique. Les plus fréquentes sont : la vérification de l’acquisition des compétences par les apprenants, le remplacement d’une unité ennuyeuse du manuel utilisé, le divertissement des apprenants, la gratification des apprenants, la diversification des moyens d’enseignement, etc.

À l’heure actuelle, l’abondance des documents disponibles pourraient engendrer la perplexité chez l’enseignant, et les questions qui en résultent le plus souvent sont du type : Comment utiliser au mieux tout ce qui existe ? Comment faire le bon choix ? La sélection (comment choisir) et la didactisation (comment utiliser) du matériel constituent en effet les deux étapes majeures de l’élaboration du matériel didactique.

Concrètement, la sélection du matériel consiste en une considération des formes du matériel, de ses sources et des critères de sa sélection. Pour ce qui est de la procédure de didactisation du matériel, elle doit prévoir son analyse pré-pédagogique, la confection des activités, la considération de la typologie des activités, leur adéquation avec les supports, la rédaction des consignes et, finalement, la présentation et la forme finale du matériel.

2.1 Première étape : la sélection du matériel

La quintessence de la conception du matériel didactique est sans aucun doute sa sélection. Les paramètres qui conditionnent cette sélection sont :

2.1.1 Les formes du matériel didactique

Selon Cuq (2003 : 75), « un document peut être fonctionnel, culturel, authentique ou fabriqué et peut relever de différents codes : scriptural, oral ou sonore, iconique, télévisuel ou électronique ». En ce qui concerne les documents authentiques, non seulement ils présentent une diversité incontestablement énorme vu qu’ils émanent de la vie quotidienne, mais ils plébiscitent aussi l’intérêt des enseignants. Pour ce qui est des documents fabriqués, leur typologie coïncide avec celle des documents authentiques, puisqu’ils reproduisent une utilisation vraisemblable de la langue. À cette typologie s’ajoute les exercices structuraux, présentés sur des supports en version papier ou électronique (DVD, CD).

Exemple : un document authentique audiovisuel.

Catégories de documents authentiques

2.1.2 Les sources du matériel didactique

La liste des documents – authentiques ou fabriqués – exploitables en classe de FLE est interminable et, par conséquent, ni la créativité ni la bonne volonté de la part de l’enseignant ne suffisent pour remédier à la perplexité éventuelle éprouvée devant cette gamme infinie. Ainsi, pour répertorier tout ce qui pourrait être à l’origine du matériel didactique, nous empruntons à Lebrun (2006 : 2) la distinction entre les « sources conventionnelles » et les « sources électroniques ». Par sources conventionnelles, nous entendons toute sorte de moyen, autre qu’électronique, fournissant des documents authentiques ou fabriqués. Par sources électroniques, nous entendons toute source de matériel sur la Toile, telles que les moteurs de recherche, les bases de données, les sites proposant des ressources brutes ou pédagogiques, etc.

Certes, pour économiser du temps et de la peine, il serait très pratique d’utiliser les mêmes supports pour les publics d’autres niveaux, en proposant bien sûr une exploitation similaire ou adaptée, d’autant plus que ces supports auraient déjà été expérimentés en classe.
Exemple : un document authentique audiovisuel puisé dans un site Internet.

2.1.3 Les critères de sélection

L’abondance et la diversité des matériels impose la considération de critères qui assurent une sélection adéquate aux caractéristiques de l’unité didactique. Ces critères sont, d’une part, d’ordre situationnel, à savoir indépendants de la volonté et des choix personnels de l’enseignant, et, de l’autre, d’ordre pédagogique puisqu’ils tracent le cadre pédagogique du cours. Le tableau suivant résume la liste de ces critères par catégorie.

Critères Situationnels

 Le cadre institutionnel

Exemple : la durée de 45 minutes des séances dans l’enseignement public grec et le respect des Instructions Officielles.


 Le public- cible

Exemple : élèves en 5e de l’école primaire grecque, de niveau A1.


 Les objectifs visés

Exemple : Sensibiliser et familiariser les apprenants à l’exploitation de la vidéo en classe de FLE et ce, dès le niveau débutant ; exploiter l’esprit créatif des apprenants en classe de FLE ; systématiser le lexique des commerces ; donner la direction à quelqu’un, au moyen d’un plan explicatif.


 Les contenus

Exemple : le quartier est une thématique présentant des contenus à la fois linguistiques (les noms des commerces) et culturels (les différences avec la culture d’origine).

Critères pédagogiques

 La centration sur l’apprenant

 La perspective actionnelle

Exemple : proposer des tâches comme de préparer un plan.

 La pédagogie différenciée

Exemple : diversifier les activités et les modes de travail.

 L’interaction

Exemple : travailler en groupes.

 La créativité

Exemple : faire un collage.

 La progression

 L’interdisciplinarité

Exemple : avec le cours des arts plastiques.

 La prise de conscience interculturelle

Exemple : trouver les différences entre un quartier grec et un quartier en France.

2.2 Deuxième étape : la didactisation du matériel

Par « didactisation » nous entendons une série de démarches nécessaires pour la transformation d’un document en matériel didactique. Ces démarches sont constituées des sept points suivants.

2.2.1 L’analyse pré-pédagogique des documents sélectionnés

En 1978, Sophie Moirand (1978, 86) propose un modèle théorique qu’elle nomme « analyse pré-pédagogique » des documents et qui a pour but l’investigation des fonctionnements du texte aux niveaux sociolinguistique, linguistique et logico-syntaxique. Certes, cette pratique n’est pas toujours possible, surtout à cause du temps limité, mais aussi de l’hétérogénéité du public. C’est pourquoi nous livrerons ici des recommandations plus succinctes et concrètes sur l’utilisation de documents en classe de FLE. Ainsi, lors du traitement préalable du document, l’enseignant doit :

 lire très attentivement la totalité du document,

 noter tous les objectifs d’apprentissage possibles pendant la lecture du document,

 noter toutes les exploitations possibles,

 garder la mise en page et tout le paratexte du document,

 associer le niveau du document avec celui de ses apprenants,

 éviter les sujets sensibles ou susceptibles de toucher à l’état psychologique des apprenants,

 vérifier la fiabilité de l’information transmise (Lemeunier- Queré, 2004 : 29),

 imaginer une exploitation à plusieurs niveaux (activités de compréhension globale, sélective, analytique)

2.2.2 L’élaboration des activités

Weiss (2002 : 9) suggère que pour inscrire une activité dans un schéma méthodologique, ainsi que dans ses propres pratiques pédagogiques, l’enseignant doit considérer : l’objectif de cette activité, le niveau des apprenants, les connaissances linguistiques préalables de l’apprenant, les savoir- faire impliqués, le mode de travail, la typologie de l’activité, son intégration dans une progression en spirale, le moment où l’on peut la proposer, les préparations nécessaires, les consignes qu’il faut y donner, la durée et le contrôle de sa réussite.

2.2.3 La typologie des activités

La typologie des activités est étroitement liée à leurs fonctions qui, selon Pendanx (1998 : 69), peuvent être rangées dans quatre catégories :

 la fonction de « découverte- exploration », sensibilisation à un problème ou à un fait de langue inconnu,
 la fonction de « structuration », fonction qui englobe également la conceptualisation,

 la fonction d’« entraînement » qui fait appel à la systématisation et à l’automatisation, surtout à travers d’exercices structuraux,

 la fonction d’ « évaluation » ou d’autoévaluation.

Ainsi, pour ce qui concerne la typologie des activités, on recourt aux catégories suivantes : les activités communicatives, les activités d’accès au sens / de compréhension (Exemple : Regardez la vidéo et cochez les noms des commerces devant lesquels la jeune femme passe), les activités d’expression, les activités dites « ludiques »

Exemple : Préparez le plan du quartier de votre école afin de le présenter à l’école francophone avec laquelle vous participez au programme e-twinning.

2.2.4 L’adéquation entre supports et activités

L’adéquation entre les supports et les activités est très importante pour l’élaboration des activités. Gaonac’h (1987 : 201) suggère en effet qu’on n’apprend pas une langue mais des situations de langage : cela signifie que la variété des activités conduit à une variété de compétences.

Exemple : une visite guidée dans un quartier s’assortit très bien avec l’élaboration du plan d’un quartier.

2.2.5 La rédaction des consignes

La rédaction des consignes doit se faire avec toute la précision voulue car l’apprenant doit comprendre immédiatement ce qu’il est invité à faire. La consigne doit requérir la réception/production d’éléments linguistiques au sein d’un contexte communicatif, tout en conservant le caractère social et la fonction communicative du texte. En outre, nous soulignons que les situations inventées pour les activités et l’entraînement de l’apprenant doivent non seulement être proches de sa réalité, mais aussi prendre sérieusement en compte le rapport de celui-ci avec le référent, qui doit absolument le concerner (Tokatlidou, 2003, 262).

Selon Djoudi , les indicateurs qui peuvent nous aider à l’élaboration d’une consigne avec plus de précision, sont les suivants : Pourquoi ce travail ? (quel intérêt pour l’élève ?), Que faire ? (Qu’est-ce que l’élève doit être capable de réaliser ?), Comment le faire et avec quoi ? (Quelles sont les conditions matérielles, les modalités de travail, la durée, etc.), Jusqu’à quel degré d’achèvement ou de réussite ? (Quelle est la barre de difficulté ?)

Exemple : Votre ami Pierre souhaite venir chez vous pour la première fois. Afin de l’aider à trouver votre maison, vous lui proposez un plan de votre quartier. Supposez que le quartier de la vidéo est le vôtre et notez dans la bonne case sur le plan qui vous a été distribué tous les magasins présentés dans la vidéo (par ex. restaurant, etc.), pour aider Paul à s’orienter.

2.2.6 La présentation et la forme finale du matériel

La présentation performante de documents didactiques relève entre autres :

 de la correction orthographique du texte,

 de la modification du texte, si nécessaire, en le simplifiant ou en l’enrichissant par des éléments iconiques ou d’autres textes explicatifs,

 de la présentation de consignes claires et soignées,

 de l’indication de l’origine du document et, finalement,

 du souci d’éviter les documents mal présentés ou mal photocopiés.

Certes, une fois la présentation des activités effectuée, nous devrons décider de la forme que l’ensemble de notre matériel aura : s’agira-t-il d’une simple photocopie, d’une fiche de travail, ou bien de la mise sur pied d’un projet pédagogique tout entier ?

Exemple : élaborer le matériel à distribuer aux apprenants, découper les premiers secondes inutiles du document audiovisuel exploité, proposer des images en couleur.

La préparation du matériel didactique en six pas :

 Considérer son contexte institutionnel (public, heures par semaine, équipement technique),

 choisir une thématique adaptée,

 définir les objectifs (communicatifs, fonctionnels, etc.),

 trouver le(s) support(s), soit dans un corpus de documents personnel, soit en saisissant des mots- clés dans un moteur de recherche,

 préparer des activités amenant à la réussite des objectifs visés,

 soigner la forme finale du matériel remis aux apprenants.

Synthèse de la fiche pédagogique proposée

3 DISCUSSION

En général, tout ce que l’enseignant propose en classe comme matériel didactique personnel dépend de sa formation, du public-cible, de sa créativité, de son inspiration, de son goût, des sources qu’il a à sa disposition, ainsi que de sa capacité à mettre tout cela ensemble afin de les utiliser d’une façon appropriée.

Certes, comme nous avons pu le constater au fil de la description des étapes de l’élaboration du matériel didactique, il s’agit d’une tâche exigeante et, souvent, pénible. Or, selon Bérard (1995 : 24), la disparition du manuel au profit d’un ensemble de supports organisés par l’enseignant ne semble pas toujours viable, car le fait que les élèves disposent d’un manuel représente un progrès. D’ailleurs, « la mise en place de ces pratiques n’est possible qu’à certaines conditions : documents et activités disponibles, temps d’élaboration intégré dans les horaires de travail des enseignants, etc. » (ibid.)

Cependant, Bérard prévoit également la possibilité pour l’enseignant d’une LE dans un avenir proche de « constituer son matériel didactique à partir de documents écrits, sonores, vidéo, informatiques, puisés dans un centre de ressources », ce qui conduirait au développement de compétences et à une formation de l’enseignant « tournées vers la gestion du support » (ibid.), ainsi qu’à l’évaluation et à l’utilisation de ressources diversifiées.

Toutes ces considérations contradictoires nous donnent matière à réfléchir à propos des entraves possibles – repérées peut-être sous la forme de stéréotypes ou même dues à un manque de formation adéquate –, ce qui pourrait fournir à l’enseignant de nouvelles bases pour une meilleure confiance en lui.

BIBLIOGRAPHIE

Bérard, E., 1995, « Faut-il contextualiser les manuels », dans Pécheur (dir.), « Méthodes et méthodologies », Le Français Dans Le Monde, Numéro spécial, CLE International, Paris p. 21-24

Cuq, J.-P., (dir.), 2003, Dictionnaire de didactique du français langue étrangère et seconde, Paris, CLE International/ Asdifle

Djoudi, M., « La consigne, chemin qui mène aux apprentissages », disponible sur http://www.oasisfle.com/documents/consigne_en_apprentissage.htm, consulté le 26 juin 2009

Gaonac’h, D., 1991, Théories d’apprentissage et acquisition d’une langue étrangère, Paris, Hatier/ Didier

Lebrun, J., Bédard, J., Hasni, A., Grenon, V., 2006, Le matériel didactique et pédagogique : soutien à l’appropriation ou déterminant : de l’intervention éducative, Presses Université Laval, disponible sur : http://books.google.com/books?id=k9eNDp10odoC, consulté le 20 mai 2009

Lemeunier- Queré, M., janvier- février 2004, « Créer du matériel didactique », Le français dans le monde, No 331, CLE International, Paris, p. 29-30

Pendanx, M., 1998, Les activités d’apprentissage en classe de langue, Paris, Hachette (Formation)

Tocatlidou, V., 2003, Langue, communication et éducation linguistique, Athènes, Patakis (en grec)

Weiss, F., 2002, Jouer, communique, apprendre, Paris, Hachette (Pratiques de classe)




1 Commentaire

  1. efi

    Cet article resume en quelques paragraphes toutes les questions posees pendant le cours de FLE. En tout cas il parait utile d’essayer faire un pas chaque fois !On peut commencer avec un materiel didactique par mois et en ajouter un chaque fois qui suit.
    Cet article nous donne la demarche a suivre afin de mieux s’orienter vers la creativite absolue en classe de FLE.

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